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Une institution de recherche publique à Champs-sur-Marne recrute un Allocataire de recherche pour une thèse sur le financement de la biodiversité. Vous serez impliqué dans l'analyse des mécanismes et des interactions entre acteurs publics et privés. Ce poste de 36 mois nécessite un doctorat en sociologie et offre une rémunération de 2200 euros bruts mensuels, tout en permettant de contribuer à des projets significatifs pour la protection de la biodiversité.
Cette offre est disponible dans les langues suivantes :
Date Limite Candidature : samedi 11 octobre 2025 23:59:00 heure de Paris
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Intitulé de l'offre : Allocataire de recherche (H/F), thèse COFRA avec le CGDD du Ministère de l'Écologie
Référence : UMR9003-STEBAR-001
Nombre de Postes : 1
Lieu de travail : CHAMPS SUR MARNE
Date de publication : samedi 20 septembre 2025
Type de contrat : CDD Doctorant
Durée du contrat : 36 mois
Date de début de la thèse : 2 novembre 2025
Quotité de travail : Complet
Rémunération : 2200 euros bruts mensuels
Section(s) CN : 36 - Sociologie et sciences du droit
Le « Biodiversity Finance Gap », le montant des capitaux manquants pour parvenir à atteindre les objectifs de protection de la biodiversité, est estimé à au moins 200 milliards de dollars par an au niveau mondial (Deutz et al., 2020), revu à 700 milliards de dollars selon les objectifs de Kunming-Montréal de 2022, un déficit qui ne sera comblé par le seul financement public. Le besoin de financement concerne le soutien à une ingénierie territoriale à même de réguler les impacts, à des activités favorables à la biodiversité mais fragiles économiquement ainsi qu’à la restauration d’écosystèmes dégradés. Les politiques de biodiversité comptent de manière croissante sur l’implication des acteurs privés pour le combler. Pour ce faire, les pouvoirs publics encouragent l’élaboration de nouveaux instruments. Le contexte de production de ces instruments et les conventions de mesure du gain écologique sur lesquels ils se fondent, sont porteurs d’enjeux écologiques prééminents (Lockie, 2023). Or ces nouvelles modalités d’action publique et leurs effets sur l’environnement ouvrent un domaine émergent et encore peu exploré. Ce projet de thèse en sociologie vise donc à étudier le travail de mise en continuité des savoirs sur la biodiversité et d’intérêts marchands pour construire de nouveaux instruments économiques en analysant (1) les débats autour de la conception de ces nouveaux outils, leur gouvernance, leur articulation avec les autres politiques publiques et (2) les controverses sur les métriques de mesure de la biodiversité qui fondent la crédibilité des instruments. Ces analyses fourniront des diagnostics au régulateur public et aux acteurs qui s’engagent en faveur de la lutte contre l’érosion de la biodiversité.
La gouvernance de la biodiversité évolue vers une responsabilisation et participation accrue des entreprises et des acteurs de la finance. Les politiques internationales et nationales se renforcent comme en témoigne la troisième stratégie nationale pour la biodiversité (SNB), dont plusieurs mesures sont dédiées à la mobilisation des entreprises et aux financements privés en faveur de biodiversité. Malgré cela, l’engagement des entreprises sur la protection de la biodiversité reste limité, fluctuant, et encore loin des attentes institutionnelles.
En application du cadre réglementaire européen, entreprises et institutions financières doivent dorénavant publier des données sur leurs risques, impacts et dépendances à la biodiversité dans le cadre de leur reporting. Ces dispositions s’articulent à celles relatives au financement de la protection de la biodiversité. La SNB propose notamment de faciliter l’engagement financier des entreprises en faveur de la biodiversité par le développement de deux instruments :
Ce mécanisme de financement volontaire de la biodiversité est promu activement par la France à l’échelle internationale (SNB3, 2023, p.230).
La logique générale de ces instruments est d’inciter des entreprises à investir dans des activités de conservation de la nature, en facilitant les flux économiques par la production et la circulation de crédits de biodiversité, catégorie de marchandise de type « immatériaux environnementaux » (Chiapello et Engels, 2021). La mise en œuvre de tels programmes repose sur une gouvernance encore en construction et sur des conventions de quantification actuellement peu stabilisées. La question du mode d’intégration des crédits dans le fonctionnement des entreprises qui les achètent est notamment encore très ouverte, alors qu’elle est centrale pour inciter la participation des entreprises dans ces nouvelles modalités de financement de l’action environnementale. De plus, la mesure standardisée du gain de biodiversité d’une unité ou d’un projet de restauration est au cœur d’enjeux à la fois écologiques et économiques.
Les nouveaux mécanismes de financement privé de la biodiversité constituent un objet d’étude peu exploré par les sciences sociales (Lockie, 2023). L’analyse de ces nouvelles orientations d’action publique et la dynamique de responsabilisation des entreprises en matière environnementale, principalement tournée vers l’étude des instruments climat, constate que leur efficacité est controversée. Pourtant, ces instruments sont appelés à se développer de manière renouvelée pour remédier à l’érosion de la biodiversité. La question de recherche qui guide ce projet est : comment s’articulent enjeux économiques, réglementaires et scientifiques dans l’élaboration de ces nouveaux instruments économiques ? Elle peut être déclinée de la façon suivante : À partir de quelles ressources organisationnelles et financières mais aussi de quelles expertises sont élaborés les instruments de la « finance biodiversité » ? Quels sont les groupes d’intérêts impliqués dans la conception des instruments et comment le régulateur public – à l’échelle nationale et européenne – participe-t-il à ce processus ? Quelles sont les grandes orientations prises ?
L’élaboration d’instruments pour mesurer des impacts de biodiversité passe par la constitution de collectifs regroupant des acteurs étatiques, des scientifiques, des acteurs de la finance et des associations d’entreprises. Le rôle des représentants des milieux d’affaires dans ce processus est encore mal connu alors qu’il est central pour comprendre comment les instruments sont conçus, selon quelle prise en compte des intérêts économiques et écologiques. L’expertise écologique d’institutions scientifiques est aussi sollicitée afin de garantir la scientificité de la mesure de la biodiversité, un enjeu stratégique de crédibilité des instruments pour les acteurs. Les indicateurs écologiques se situent dans une zone floue entre science et politique et gagnent à être étudiés à partir des cadres de la sociologie de l’action publique et la sociologie des sciences et de la quantification. Les controverses métrologiques sur les indicateurs pertinents pour mesurer la biodiversité traduisent des conceptions hétérogènes. Les nouveaux instruments, tels que les crédits biodiversité, sont élaborés dans des arènes où collaborent des acteurs aux expertises et ressources hétérogènes, leur permettant d’appréhender la matérialité de la biodiversité de manière inégale. Il s’agira de qualifier le travail d’élaboration de métriques au sein de ces collectifs en tant que processus « sociotechnique », et de regarder quels types de compromis émergent, et notamment s’ils vont dans le sens des métriques les plus simples. Pour cela, l’attention sera portée sur les enjeux de positionnement d’acteurs et d’encastrement des niveaux internationaux et nationaux car ils participent à construire et équiper la promesse de gain écologique et économique et influencent les décisions prises à l’échelle nationale et européenne. Enfin, si le régulateur public accompagne ce processus de production d’instruments, son contrôle lui échappe en partie. Les acteurs du conseil et de l’audit sont des intermédiaires actifs dans la coproduction et l’utilisation des métriques. Il s’agira d’observer comment ils participent ou non à complexifier les circuits de légitimation de ces instruments et se positionnent comme de nouveaux intermédiaires de la conservation.
Pour étudier ce nouvel élan institutionnel qui traverse les politiques de conservation de la biodiversité, la personne recrutée produira une analyse sociologique à la croisée de la sociologie de l’action publique, de la sociologie économique et de la sociologie des sciences et des techniques. L’enquête débutera par une recension des initiatives internationales, européennes et nationales d’instrumentation de la « finance biodiversité » et l’élaboration d’une cartographie problématisée des modalités de gouvernance et des types de mesure qui sont discutées. Une étude documentaire permettra de saisir les circulations des cadrages concurrents, c’est-à-dire des différentes conceptions des nouveaux instruments promus et de la gouvernance associée. L’enquête se poursuivra dès la première année par la conduite d’entretiens (n=50) auprès des participants aux initiatives de coproduction de ces instruments pré-identifiées (à amender selon les résultats de la recension) :
En plus des entretiens, une analyse documentaire des productions de ces initiatives ainsi que l’observation d’évènements publics et de réunions, permettront de caractériser les conditions concrètes de l’élaboration des instruments, les formes de rationalisation à l’œuvre dans la promotion des divers types de mécanismes et de mesures, ainsi que les collaborations entre acteurs économiques et spécialistes de la biodiversité.
Le travail de doctorat sera encadré par Stéphanie Barral (INRAE/LISIS) et Fanny Guillet (CNRS/CESCO/LISIS). La personne recrutée sera accueillie au LISIS et rattachée à l’école doctorale OMI (Organisations, Marchés, Institutions) de l’Université Gustave Eiffel. Le financement de la thèse est d’une durée de trois ans et la rémunération se fera sur la base des grilles de la fonction publique.
La thèse sera conduite dans le cadre du dispositif COFRA qui permet de réaliser la thèse au sein du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) dans le Service de l’Économie Verte et Solidaire. Plus précisément, la personne recrutée sera intégrée au projet « Financement de la Biodiversité » dirigé par Patrick Deronzier. Pendant les deux premières années de la thèse, la personne recrutée partagera son temps de travail entre le CGDD et le LISIS. La troisième année de la thèse privilégiera la présence au laboratoire afin de favoriser le processus d’écriture. Dans le cadre de l’accueil au CGDD, elle pourra être amenée à prendre en charge des missions spécifiquement liées à l’objet de la recherche, tel que le pilotage d’un groupe de travail ou d’une étude.
La thèse comportera deux types de livrables :
Réalisation de la thèse sur deux sites différents (CGDD et LISIS)